blame game w/elvis

« let's play the blame game for sure »
@elvis jenkins

elle abandonne rapidement l’idée de claquer sa porte pour signifier sa présence. quand bien même elle l’aurait claqué de toute ses forces, au vu du volume sonore qui émanait du salon, cela n’aurait pas fait bouger un sourcil. la pénombre illumine le bas de son visage alors qu’elle est allongée sur son lit, un pied sortant de sa couette. elle expire bruyamment en virevoltant de droite à gauche puis de gauche à droite. elle attrappe son téléphone posé sur la petite étagère accrochait au-dessus de son lit. l'écran indique deux heures quarante-cinq. - fais chier chuchote-t-elle en se rendant à l'évidence. cette nuit encore, elle ne dormirait pas suffisamment. la veille, elle s'était endormie à la lueur du jour trop préoccupée à penser à milo se rêvant déjà pendue à ses bras. elle avait cette mauvaise habitude à se projeter avec une aisance incroyable. elle vivait ses relations amoureuses avant même qu'il y ait réellement de relation. et il faut dire que ça ne l'aide pas. elle s'était promise que cette fois, elle se contrôlerait.

maintenant qu'elle est réveillée que pouvait-elle faire ? elle s'était déjà imaginée se lever et demander au responsable de se taire et puis à entendre rire et débattre à voix haute, elle ne se voyait pas jouer la rabat-joie. elle se redresse en s'aidant de ses coudes légèrement secs et qui mériteraient un peu de crème hydratante. assise au bord de son lit, elle se lève sobrement en direction de son placard. elle se couvre de son kimono en soie, trouvé dans une brocante deux ou trois ans auparavant. les mains derrière sa nuque viennent soulever ses cheveux afin de les libérer. elle passe ses mèches qui lui tombe dans les yeux derrière ses oreilles avant de jeter un coup d'oeil à son reflet dans le petit miroir accroché de biais. elle attrape son baume à lèvre qu'elle dévisse délicatement. le bout de son majeur effleure la substance grasse avant de venir la déposer sur ses lèvres. ça leur donne un effet légèrement pulpeux. son regard se pose sur sa bibliothèque et plus précisement sur son stock de weed logé entre les fleurs du mal de baudelaire et l'attrape-coeurs de salinger. - perdue pour perdue pense-t-elle à voix haute cherchant à se convaincre elle-même.

barbara se saisit de ses têtes qu'elle place dans son grinder légèrement usé. elle attrape une feuille qu'elle plie méticuleusement avant d'y déposer sa weed. lentement, elle bouge ses doigts de gauche à droite avant d'y insérer un filtre. sa langue vient au contact de la feuille avant de la refermer. elle n'avait pas à rougir de ses compétences en "roulage" de joint. l'entraînement fini par payer.

elle porte son joint entre les lèvres avant de l'allumer. elle jette le briquet sur la surface en bois qui lui sert de bureau puis se dirige d'un pas presque nonchalant vers sa porte. à la regarder déambuler dans le couloir, elle ressemblerait presque à une star hollywoodienne. elle vient s'adosser contre le mur du salon. en crachant la fumée qu'elle vient d'inhaler, elle détaille chaque visage présent dans son salon. ils y a ceux qu'elle connaissait et puis il y en avait toujours de nouveaux le plus souvent aux traits féminins qu'elle ne revoyait jamais. elle tire à nouveau sur son joint avant de poser son regard désappointé sur le visage d'elvis. ok, c'était samedi, mais est-ce qu'il été obligé de ramener toute sa bande à la coloc ?

Soirée arrosée, l'alcool qui coule à flot et les maux de tête qu'il regrettera demain, commencée dans l'après midi autour d'une partie de jeux vidéos et qui s'est fini dans l'appartement des quatre avec quelques potes. Elvis qui fout la musique à fond, se foutant pas mal des réactions qu'il pourrait provoquer chez ses colocataires. Egocentrisme exacerbé. Mais ils le connaissent et ils savent tous qu'il s'fout pas mal des autres. Parfois même, c'est par pure provocation qu'il va jouer au con. Il a besoin d'repos lui aussi mais il est habitué à dormir peu, pile électrique qui a peur de rater sa vie en la passant dans son pieu -sauf si c'est accompagné d'une jolie fille-. Ses traits le trahissent pourtant, il a une mine effroyable. Mais en parlant d'gonzesse, il en a trouvé une à son goût c'soir. Elle ne rivalise en rien avec sa rencontre sulfureuse en compagnie de Venus mais elle sera largement suffisante pour qu'il se vide les couilles. Il ne va mentir en lui disant qu'il veut construire une relation avec elle, c'est pas son genre. Il ne promet qu'une nuit agréable où aucune autre n'a eu à se plaindre avant. Lui qui est pourtant là aussi souvent trop centré sur son propre désir pour prendre en compte celui d'sa partenaire. Quel crétin quand même. Sa bière à la main, il est caler dans un des canapés, bras derrière l'épaule de sa conquête d'un soir, sourire qu'il offre à ses amis tandis qu'ils se lancent dans une discussion futile, une de celles que l'on nourrit à cause de l'alcool et qui semble primordiale sur le moment. Pétard qui tourne et qui arrive finalement dans sa main tandis qu'il pose son breuvage sur la table.

Ses yeux s'lèvent finalement vers elle, iris sombres qui se fondent dans ses yeux noisettes. Barbara. Amie trop délicate pour lui. Il est clair qu'il la mérite pas. Elle dont la douceur se confond paradoxalement avec la colère dont elle peut abuser à son égard. Faut dire qu'il a tendance à la pousser à bout dans ses retranchement, comme si le jeu en valait la chandelle. Histoire médiocre qu'ils ont vécu y'a trop longtemps mais qui s'est terminé sans vraiment apposé de point final, juste comme ça, parce que c'était plus simple pour tout le monde. Alors des fois, y'a cette foutu jalousie qui les étreint. C'est débile quand on y pense, ils ne s'aiment pourtant pas comme deux amants. Il n'est même pas sûre de vouloir à nouveau la foutre dans son lit mais ça l'fait chier d'la voir avec un autre. Relation pathétique et malsaine, un peu comme toutes celles qu'il nourrit en vérité, comme si le gamin cherchait lamentablement à se foutre dans la merde. Juste pour sentir son cœur battre. Juste pour avoir la sensation d'être vivant, même pendant une seconde. Jeux de dupes qui s'lancent quand il accroche son regard malicieux et vient l'accoupler avec un sourire narquois. Jeu de regard qui s'installe tandis qu'il sort son téléphone portable sans quitter sa place pour y annoter quelques mots à son attention et le poser sur l'accoudoir du canapé. Il sait qu'elle ne tardera pas à répondre, elle aussi trop accoutumée de ce petit jeu puéril.

@elvis jenkins

sa mâchoire se serre mécaniquement en réponse à son sourire railleur. elle n’en détache pas moins son regard qu’elle maintient détaillant chacun de ses gestes. elle suit son bras qui ceint les épaules de cette fille assise à côté de lui. elle la détaille, elle aussi. elle ne lui trouve rien d’exceptionnelle, un peu vulgaire sur les bords quand elle rit à gorge déployée à l’une des blagues d’elvis. barbara n’y a pas fait attention à la blague, ça ne l’intéresse pas vraiment. son activité mentale s’accélère.

qui est cette fille ? est-ce qu’elle va rester encore longtemps ici ? et puis qu’est-ce qu’il lui trouve, elle n’est pas si jolie. enfin, si elle a quand même un joli visage. elle doit être sans doute plus jolie que moi… je me demande ce qu’il lui a raconté pour la ramener ici. en même temps, est-ce qu’elvis a vraiment besoin de dire quelque chose ? il a juste à ouvrir la bouche et avec sa voix suave il capte l’attention de l’audience. connard. par pitié, que je n’ai pas à lui parler. j’ai pas la force de faire semblant de m’y intéresser.

putain, elle aurait dû le charger davantage son joint.

c’est quoi ? sa nouvelle conquête ? il va faire ça tous les week-ends. tu fais chier elvis.  putain, même pas il me dit bonjour. donc, on joue sur l’ignorance ce soir, quand tes amis sont là. tu fais vraiment chier elvis. et pourquoi je me mets dans cet état. j’devrais m’en foutre d’elvis et de cette meuf. il fait bien ce qu’il veut. oui, mais pas avec elle, ni avec les autres d’ailleurs en fait il fait pas ça. ça se fait pas. je veux bien être gentille mais là il dépasse les bornes. c’est la dernière fois…

elle écrit déjà des répliques qu’elle enterrera avant même de les faire vivre. et, dans son dialogue, elle a une répartie prodigieuse. et dans la vraie vie, sa répartie se fait la malle. elle est abonnée au 'j’aurais dû lui dire ça' et particulièrement avec elvis. elle n’a jamais su être autre chose que silencieuse avec lui, et c’est d’autant plus frappant quand c’est lui. elle sait déjà comme ça va finir, ça finit toujours de la même façon : il lui fait une blague, elle ne peut s’empêcher de sourire et elle lui pardonne jusqu’à la prochaine fois.

parfois, elle regrette de s’être autant investi émotionnellement dans leur relation pour le peu de retour sur investissement perçu. c’était prévisible, barbara, c’était prévisible. elle ne sait pas faire dans la simplicité. c’est pourquoi, au lieu de fréquenter des garçons qui serait fondamentalement stable, elle est sans cesse attirer par ceux qui ne savent pas, qui ne veulent pas. oh, pauvre barbara. elle s’était projetée avec elvis, trop rapidement comme à son habitude. s’il n’avait pas été dans le même groupe, il aurait fini par la ghoster c’est certain - après l’avoir baisé bien sûr. ils en sont pas loin, ils ont couché ensemble souvent et puis un jour ça s’est arrêté. il n’y avait eu aucun signe hormis celui d’elvis qui se ramène au bar avec sa nouvelle conquête. l’équivalent d’un poignard dans le coeur. elle en avait pleuré pendant des semaines avec personne avec qui partager sa peine. parce qu’ils l’ont dit à personne, encore aujourd’hui personne n’en sert rien et personne n’en saura jamais rien. en attendant, barbara ça lui fait parfois encore mal au coeur. elle n’a même pas été suffisamment courageuse pour lui demander des comptes.

son téléphone vibre dans la paume de sa main. elle se laisse quelques secondes avant d’y jeter un oeil. son prénom s’affiche. ‘pas ce soir, elvis’ aurait-elle envie de lui dire avant d’aller se recoucher mais au lieu de ça elle s’enfuit dans la cuisine à la recherche d’un remontant. la soirée allait être plus longue que prévue. elle lit ses mots et elle tourne cinq fois sa phrase avant d’envoyer une réponse qu’elle trouve, après relecture, particulièrement médiocre. tant pis.

Il joue de son arrogance. Gamin qui apprécie trop cette idée d'la rendre folle, gamin qui a besoin qu'on le regarde et qu'on l'aime. C'est cruel d'être aussi égoïste mais il a eu des modèles exceptionnels dans ce domaine. Papa s'est soucié plus vivement de ces magouilles que d'ces gosses et Maman a prétexté la folie pour ne pas avoir à gérer les dégâts. Cœur sacrifié dans la parade. Elvis qui s'est forgé son caractère de con comme parade face à l'inéluctabilité des émotions qu'il ressent. Parce qu'il ne faut pas se saisir de sa nonchalance et son impassibilité. Il ressent. Peut être même plus vivement qu'le commun des mortels mais il sait pas quoi faire avec tout ça alors ça s'embrouille chez lui et ses rapports deviennent maladroits ou malsain. Entre agressivité, cruauté et indifférence. Il ne se lève pas pour venir la saluer volontairement. Pour faire croire que c'qu'il fait a plus d'importance. Blague qu'il lance à la volée. Et l'autre qui rigole comme s'il était l'humoriste le meilleur du monde. Elle était pas si bonne. Elle est totalement sous son charme la conne. Elle s'est pas c'qui l'attend quand il l'aura sauté pour ensuite lui dire merci et au revoir. Oui, parce que c'est une règle d'or, jamais plus de trois fois. Ca a peut être été plus à l'époque avec Barbarba. Il se souvient pas bien. C'était y'a des lustres. Et puis, l'côté secret avait clairement attisé son désir. Sauf qu'il avait fini par s'dire qu'c'était une grosse connerie pour le groupe. Alors il avait ramené une autre meuf pour lui faire comprendre que c'était fini. Tout en délicatesse et subtilité. C'est pour ça que ce petit jeu continu depuis des lustres, lui qui entretient sagement ce lien qui l'uni à Barbara. Y'a c'sentiment d'inachevé. Il tire sur son joint alors que sa réponse ne se fait pas beaucoup attendre. Sa dignité, elle est mignonne, comme s'il en avait quelque chose à foutre, tout comme ce sommeil qu'elle peine à gagner d'ailleurs. Le cadet de ses soucis. Sourire qui étire ses lippes quand il comprend qu'elle va jouer l'jeu ce soir. Ce n'est pas toujours le cas, la souris se défile parfois pour ne pas avoir à subir les affres du chat. Il répond rapidement et elle aussi. Game on. Elle tente bien de l'insulter et son regard désapprobateur se cale contre le sien tandis qu'il resserre un peu son main contre l'épaule de sa partenaire d'une nuit. Elle a ses règles ou quoi ? Elle fait chier tiens. Il continu de lui répondre et elle se montre pour le moins agressive. Sourcils qu'il fronce pour toute réponse, ces muscles qui se tendent. Son insolence qu'il impose dans les SMS qu'il envoie. Petit con. Il essaie de ne pas se formaliser de ses mots, de faire comme s'il n'en avait rien à battre de ce qu'elle lui envoie mais son visage devient trop expressif. Nouvelle taffe qu'il tire avant de le tendre à son voisin de droite. Sa bière qu'il récupère sur la table basse, quittant l'épaule d'la gamine. Oui parce qu'elle est trop jeune pour lui. Trop jeune pour comprendre ce qui va lui arriver. Elle qui a les yeux qui brillent quand elle les pose sur lui. Mais putain, elle a un de ses culs. Divin. Il s'étire doucement pour finalement régler ce conflit en direct. Parce qu'il sait. Il connait les failles de la jolie Barbare qui a tant de choses à avouer sur son téléphone. Elle n'est pas si féroce quand il est à quelques centimètres seulement. Il avale une gorgée et se lève, indiquant à sa conquête qu'il revient, laissant son téléphone sur le côté après le dernier message sournois qu'elle a envoyé. médiocrité hein ? qu'il lâche, une fois à son niveau. Lui qui dira à quiconque que Barbara est comme sa sœur. Vraiment ?

elle essaie de rester solide sur ses deux jambes même si au fond de son estomac, il y a ce poids qui vient bloquer sa respiration. ce fichu poids qu’elle ressent constamment. de temps en temps, elle s’autorise à rêver qu’un jour elle se délestera de ce dernier, se laissant envahir par l’insouciance de la vie. ça n’arrivera sans doute jamais, à quoi bon rêver.

sept ans, cela faisait sept ans que leur avenir amoureux avait été balayé d’un revers de main. il réside un débat muet sur la façon dont on qualifie cette période. vous demanderiez à barbara, elle serait la première à vous dire qu’elle a bien été en couple avec elvis jenkins. pour autant, on parierait pas grand chose pour deviner qu’elvis lui a une vision bien différente de tout ça. finalement, chacun à sa vérité dans laquelle il se complait. en couple, tu parles, personne n’était au courant et ça à même pas durée plus d’un mois. couple en carton, ouais. le soir quand elle ne peut s’arrêter de penser, elle a des idées qui la traversent de part en part : et si ? qui joue l’effet papillon dans son esprit angoissé. et si ? et puis très vite elle passe à autre chose car il ne pouvait y avoir de ‘et si’.  

ce que barbara ressent pour elvis n’a rien à voir avec de l’amour, non, c'était quelque chose de bien plus insidieux. ce qu’elle redoute le plus, barbara, c’est de ne plus avoir de relation avec elvis tout court. il avait été effrayant de voir la façon dont elle l’avait laissé prendre place dans son quotidien. elle lui a laissé tellement d’espace que s’il devait un jour disparaître, elle aurait bien dû mal à combler tout ce vide. sans doute que le reste de sa vie ne suffirait pas. barbara préfère de loin encaisser les actes et mots cruels d’elvis. que de le mettre sur le banc de touche. c’est ça façon de gérer.  

cela impliquait alors leurs joutes verbales comme celle qui venait d’être lancée au hasard de ce regard croisé. c’est qu’elle doit pas être si intéressante cette fille pour qu’il vienne m’emmerder se rassure-t-elle. il fait ça en secret, tout est toujours camouflé : un texto, un mensonge, une distorsion de la réalité…

elle tape vigoureusement sur son clavier de téléphone. elle se montre odieuse, et elvis vient la piquer là où ça fait mal. ah ouais, il passe pas à côté de sa vie lui, bâtard. elle serre à nouveau les dents. elle inspire et expire à plusieurs reprises pour faire redescendre son émotivité qui grimpe en flèche. encore quelques coups et les larmes finiront par s’évader et brouiller sa vue. elle est fatiguée, c’est pour ça qu’elle se montre si désagréable. ça et les agressions d’elvis n’ont pas pour objectif de calmer ses nerfs. elle sait parfaitement ce qu’il est en train de faire et elle le laisse faire.

elle jette des coups d’oeil succinctement, elle le trouve ridicule à se rapprocher de cette nana qu’elle dévisage en haussant les sourcils. elle observe le visage d’elvis réagir. avec le temps, elle aussi à appris à venir frapper là où ça fait mal mais barbara en use qu'en cas d’attaque. après tout, il le cherche.

elle se pince l’intérieur des joues quand elle le voit se hisser du canapé de toute sa hauteur. il est grand elvis et même avec son mètre soixante-dix-sept, quand elle lui fait face, barbara doit lever les yeux. elle vient faire cogner un à un les doigts de sa main droite contre la surface du bar de la cuisine. dans le même temps, elle se récite la table de six, à une très grande vitesse, à six reprises. elle a toujours peur que quelque chose puisse s’empirer, alors elle fait ç.a comme solution ultime.

barbara 1 - le coup d’un soir 0. elle en jubilerait presque si elle n’était pas autant fébrile.

c’est le mot médiocrité qui a joué le rôle de déclencheur, elle aurait dû lui dire plus tôt. - bonsoir elvis répond-t-elle avec une certaine tiédeur. elle se détourne de ses yeux pour aller se servir un verre. elle fouille dans le frigo à la recherche de quelque chose qui pourrait lui donner le courage de lui faire face pour une  fois. - tu passes une bonne soirée ? elle ne veut pas savoir en réalite. elle trouve un fond de whisky, qu’elle se sert on the rocks.

à ta médiocrité
- à la tienne. lance-t-elle en tendant le verre dans les airs quelques secondes avant d’en boire une gorgée.

Chien galeux qui s'comporte comme si elle était son os. Barbara, il lui ronge la santé de son incapacité à la couvrir d'une amitié normale. Lui qui n'sait pas comment faire. Bancal dans ses relations. Il refuse de la voir heureuse avec un autre et sabote chacune de ses histoires alors qu'en définitive, il n'a rien à lui offrir. Rien à donner d'plus que ses sourires de merdes et ces jeux à la con. Elle fait pourtant partie de ces personnes qui font qu'il aime la vie, dans ce foutu vide qui les entoure, elle est là Barbara. Tout le temps. malgré les incompréhensions, les non dits et les réticences. Elle est là. Et il chéri cette absurde constante parce que le gamin est terrifié par l'abandon. Pourtant, vu comment il traite les personnes qui lui sont proches, il finira sans doutes par s'retrouver seul comme un connard. Provocation qui se terminera par une dépression. Un jour, ils en auront marre et lui tourneront le dos non ? Et dans le fond, c'est peut être ce qu'il cherche, à se saboter pour expliquer son comportement. Parce que comme ça, il aura une bonne excuse pour se montrer aussi sournois.

Il n'a jamais donné d'suite avec Barbara. Il a jamais voulu construire. Elle n'était qu'une de plus. Une qu'il aurait largué rapidement si elle n'avait pas eu une si jolie voix. Une qui aurait fini aux oubliettes. Lui qui ne laisse aucune chance à celles qui partagent sa couche d'toutes façons. Le combat perdu d'avance. Histoire d'amour dont il se moque et qu'il fustige d'injures dès qu'il en a la possibilité. Parce qu'on est niais quand on aime putain. La débilité qui prend l'dessus. L'air bête sur l'visage. Très peu pour lui. La vérité, c'est qu'il tue volontairement chaque début d'histoire dans l'œuf pour éviter d'se retrouver coincé. Il saurait pas gérer une véritable histoire d'amour l'gamin, il a pas la maturité pour. Sa joue qu'il caresse presque tendrement quand il termine de prononcer le mot médiocrité. salut. qu'il souffle de sa voix rauque, son regard qui coule dans sa direction tandis que sa main s'échappe très vite pour attraper le joint qu'elle tient dans sa main pour l'porter à sa bouche. Elle qui sera grisé par ce simple geste. Lui qui sait qu'il a c'pouvoir sur elle. Qu'il peut la faire hurler et profiter d'un sourire ou d'une étreinte ensuite. Le tout sans ambiguïté aucune bien sûr. Mon cul. Il entretient le malsain d'cette relation parce que si elle s'éloignait trop loin, il la rattraperait avec cette volonté terrifiante de continuer à s'détruire à petit feu. Foyer qu'il alimente d'étincelles, prêt à se brûler dans la manœuvre sans jamais mettre en péril sa vie. Faut pas lui en vouloir. Il fait pas exprès. Il aime juste mal. Mais qu'elle se rassure, elle est pas la seule, c'est pareil avec tous les autres. toi un peu moins visiblement ? Il hausse les épaules et regarde le verre qu'elle tend en faisant teinté sur sa bière dessus. Il souffle ensuite la fumée et les volutes blanches virevoltent autour de la chevelure de Barbara. Sourire qu'il offre avant de lui tendre à nouveau la cigarette qui rigole.

@elvis jenkins

elle se fige quand elvis approche délicatement sa main contre sa joue chaude. elle aurait voulu faire un pas en arrière et lui dire ’t’as cru que ça allait s’passer comme ça ?’ et la seule chose qu’elle est bien capable de faire c’est de se taire. il a bien raison d’avoir confiance en ses gestes car barbara ne dit rien, ne fait rien. elle n’a pas besoin d’analyser la situation bien longtemps pour comprendre ce qui est en train de se jouer. elvis attaque et barbara n’a pour se protéger qu’une défense chancelante. décevant. il a toujours eu un coup d’avance. elle a essayé de se montrer moins docile mais elle n’est plus un mystère à décoder, sa faute. elle a laissé la porte vers ses secrets entrouverte trop longtemps. il n’a eu qu’à se servir allègrement et il n’a pas hésité une seconde, le traître. en réfléchissant, c’est peut-être ce qu’il sait faire de mieux.

il lui ôte son joint de ses doigts délicats. elle s’en veut de lui laisser les commandes si facilement. c’est plus simple de lui tenir tête quand elle est cachée derrière son écran de téléphone. elle n’a jamais été aussi effrontée que par texto. elle l’étudie minutieusement. il a les pupilles provocantes presque aguichantes. elle lutte déjà pour ne pas se faire repousser dans ses retranchements trop rapidement. ses yeux roulent d’agacement, parce qu’elle le voit s’approprier son joint. ce n’est pas la première fois qu’il fait ça, de s’approprier les choses qui lui appartienne. elle sait qu’il vient dans sa chambre quand elle est absente pour se servir dans son stock de weed. elle le sait et elle ne lui a jamais dit. elle le sait parce qu’il ne remet jamais le pot correctement parce qu’elvis, il s’en fiche. il n’en a rien à faire que barbara puisse le choper en train de servir. ils sont potes, elle peut bien lui offrir ça. c’est l’argumentaire qu’il lui sortirait et auquel elle ne pourrait que rétorquer en haussant les épaules de façon désabusée. sers-toi j’t’en prie, elvis, fais comme chez toi. ne te soucie surtout pas de moi.  

barbara s’était souvent demandée si le problème venait d’elle. est-ce qu’elle avait fait quelque chose qui avait fait fuir elvis à un moment donné ? et aujourd’hui, encore, elle s’écorche l’esprit en retournant la situation dans tous le sens. qu’est-ce qu’elle lui avait fait pour être la victime de son courroux ? c’était épuisant d’être l’amie d’elvis. barbara se braque à chaque remarque dont il lui fait l’honneur. si elle n’était pas aussi attirée par l’aura qu’il dégage, ça fait longtemps qu’elle l’aurait envoyé sur les roses. elle finit par briser le silence dans lequel elle s’était mue. - en effet, ce n’est pas l’adjectif que j’aurais employé pour qualifier ma soirée. ses paupières se referment brusquement quand la fumée l’atteint. barbara n’est pas violente mais elle aimerait lui foutre deux claques pour lui faire passer l’envie de sourire. sa main vient évacuer son visage du reste de fumée. elle avale à nouveau une gorgée avant de rétorquer - désolante… ma soirée est désolante elvis. et c’est entièrement de ta faute. - on peut savoir combien de temps ta petite sauterie va encore durer ?

Il a toujours pris beaucoup de place là où il se pointait Elvis. L'franc parlé qui fait peur et qui l'fourre souvent dans des situations pas possibles. Connaitre Elvis, c'est éreintant, lui qui prend clairement beaucoup plus qu'il ne donne. Une chance pour lui d'être aussi entouré quand on y pense. Sans doutes grâce à ce charisme qui émane et qu'on aime le détester. Attachiant. Même s'il est plus chiant qu'attachant. Il provoque de ces gestes et de ces mots à chaque seconde, réaction qui manque de vivacité chez Barbara, il a clairement l'ascendant sur elle et ça lui plait. C'te idée grandiose qu'il peut se comporter comme il le souhaite et qu'elle ne dira rien. Jamais. Elle qui avoue malgré tout que sa soirée est désolante, lui dont le regard joueur ne s'efface pas. L'idée d'la pousser à bout lui plait, parce qu'il est évident qu'il va gagner la partie, il gagne toujours Elvis. mince ton god ne fonctionne plus et tu n'arrives pas à t'trouver un mec pour venir calmer tes envies ? Crétin putain. Il est vraiment trop con. Pire que ça, il est très fier de ses mots, de sa répartie franchement pénible. j'en sais rien. qu'il commence par dire en haussant les épaules, nonchalant à souhait. pourquoi tu ne te joins pas à nous ? Regard qu'il jette à la dérobée à sa conquête avec ce sourire de prédateur qui lui va si bien. Le lion est en cage pour le moment mais il compte bien le libérer dans quelques minutes pour faire subir à cette pauvre gazelle sans défenses un sort terrible. Parce qu'elle ne sait pas vraiment ce qui l'attend la gamine qui lui offre un sourire en retour.

Elle est toujours un peu chancelante face à lui, parce que même s'il se montre 90% du temps ignoble avec elle, y'a toujours ce moment où se trouve être adorable et répare en une fraction de seconde tous les dégâts qu'il a pu causer. Il suite la connerie et la vulgarité de tous les pores de sa peau. Ce n'est pas qu'elle. Barbara n'est pas la seule qu'il a sous son emprise, disons qu'elle est la plus docile. Lui qui feint trop facilement l'indifférence quand elle réplique. Surement parce qu'au fond de lui, il a cette certitude vertigineuse qu'elle ne le lâchera pas, qu'elle lui restera fidèle, comme un bel animal familier qui traine entre nos pattes. La vérité, c'est que si elle venait à l'sortir de sa vie sans se retourner, il s'rait chamboulé, mortifié. Sa présence qui est d'une importance cruciale dans son existence même si ça, il ne le dit jamais qu'à mi-mot, par peur d'passer pour un con. La dernière fois qu'il a avoué aimer quelqu'un, cette dernière a préféré se faire interné plutôt que d'devoir gérer ce flot d'émotions, alors ça aide pas. Une excuse qui tient la route quand on y pense même si ce n'est pas suffisant pour expliquer ce qu'il est. Succession de choix à la con. Rôle dans lequel il s'est conforté à défaut de mieux. Un clin d'oeil à sa proie et son regard revient se hisser dans celui de son ex petite-amie à nouveau. j'devrais pas tarder à aller me coucher ceci dit. Enfin se coucher... Sous entendu trop évident pour qu'elle ne le voit pas. De toutes façons, il manque tellement de discrétion qu'elle ne pourra qu'entendre ces ébats à travers le mur. Parce qu'il se fout qu'elle entende. Bien au contraire, ça l'fait même un peu kiffer de la savoir de l'autre côté à écouter.

@elvis jenkins

l’entourage de barbara demeure hyperactif, bruyant et envahissant. elle ne se rend pas au hasard des rencontres. barbara fréquente ces gens qui prennent de l’espace, qui parlent fort et cela depuis l’enfance. des personnalités fortes pour s’autoriser à s’effacer. ce qui est paradoxale puisqu’à dix-sept ans, elle a décidé de postuler pour devenir chanteuse dans ce groupe de rock. devenir chanteuse impliquait de se produire sur scène et soudainement être le centre de l’attention. et dieu sait qu’elle déteste l’être mais allez savoir peut-être que dans le noir, c’est plus facile.

de sa rencontre avec elvis, elle se souvient du moindre geste, de la moindre parole, de la moindre respiration. barbara a une très bonne mémoire, si elle vous dit le contraire c’est qu’elle ne veut pas se souvenir. c’était la première fois qu’ils se regardaient vraiment. il avait le regard interrogatif et les sourcils arqués presque impatients. réaction provoquait par le faux départ de barbara. elle s’était mise à tousser en s’excusant demandant si elle pouvait recommencer. ils avaient écrit qu’ils faisaient du rock mais barbara, elle a décidé qu’elle allait leur chanter du elton john. elle s’était mise derrière le clavier de cette salle de musique particulièrement défraichie par le temps. ses mains tremblaient au contact des touches du clavier. les premiers accords qu’elle répète quatre fois avant de se lancer. elle expulsa sa voix avec une douceur qui était la sienne. la pièce s’était vêtue d’un silence d’or. les aigües avait résonné dans les airs sur les avants-dernières phrases des couplets. c’est sans doute à ce moment-là que la magie avait opéré, en tout cas sur les deux autres. elvis avait feint une certaine indifférence. avant même de se connaître, la provocation était déjà reine.

et aujourd’hui, ils en sont là dans cette cuisine valsant au rythme de leur vieille rengaine. c’est devenu un jeu particulièrement vicieux. barbara s’en sortira sans doute avec des bleus au coeur enfin si un jour elle y décidait d’y mettre un terme - à leur amitié. quant à elvis, la fin n’est jamais envisagée. le jeu perdure tant qu'ils sont là, tant qu'elle est encore là.

barbara met quelques secondes avant que son corps, et particulièrement son visage réagissent à ce qu’elle venait d’entendre. pardon? ses sourcils sont suspendus dans les airs et ses paupières se ferment lentement. elle repousse légèrement sa nuque en arrière. elle en était presque désespérée. - donc après trois heures du matin, y’a plus aucune limite, c'est ça ? ses yeux lui acèrent des éclairs. elle le trouve particulièrement abjecte, lui et ses remarques sexistes. même sur ça, elle laisse passer. - tu ne me laisses pas le choix que celui de me répéter mais… pause qu’elle utilise pour se détourner légèrement d’elvis - …ta médiocrité me déconcerte. finit-elle par conclure à voix basse. elle ouvre l’un des tiroirs à la recherche d’un briquet ou d’allumettes. elle a besoin de fumer pour arrêter de penser. barbara ne semble pas vouloir lui offrir le dernier mot, du moins pas pour le moment. elle montre même des signes de rébellion ou c'est son joint qui commence à faire effet.

elle finit par mettre la main sur un vieux paquet d’allumettes se hâtant de rallumer son joint laissé à l’abandon. il n’était pas question qu’elle se joigne à eux, sans façon. barbara ne désirait qu’une seule chose : dormir. elle vide son verre avec une rapidité déconcertante avant de s’en servir un second. boire pour oublier, c’est comme ça qu’on dit non ? elle lève les yeux vers lui, prête à lui faire face mais il trouve rien de mieux que de se pavaner comme un paon. - parfait, et tu me mets tout ce petit monde, sans exception, dehors. conclue-t-elle appuyant longuement sur le sans exception.

Elvis, c'est un acharné de la maladresse. Plus il pique fort, plus il aime. Lui qui n'peut pas s'arrêter, les limites dont il n'a jamais vraiment disposé et qui lui éclate à la gueule comme un jeu malsain aujourd'hui. Elle fait les frais de sa personnalité de merde Barbara. Mais elle le sait non ? Que s'il agit comme ça, c'est parce qu'elle est indispensable dans sa vie. Elle mérite mieux qu'ce petit merdeux. Il la traite comme si elle n'est rien. Il joue avec elle à chaque occasion, manipulation comme clé de succès. Lui qui blesse plus qu'il ne fait du bien, juste pour voir briller cette lueur à l'intérieur de son regard. Lui qui aime d'une amitié bancale. Crétin. hey. qu'il lâche, comme si c'était possible qu'il soit vexé par ses mots, comme si elle avait réussi à l'atteindre. Pas vraiment, qu'on s'le dise, les mots qui glissent sur lui le plus souvent. Dans une frénésie mal contenue, elle s'affaire des les tiroirs. Lui l'observe, sans savoir ce qu'elle peut bien chercher comme une furie. Sans comprendre que c'est aussi une excuse pour ne pas affronter son regard. Leurs regards s'accrochent finalement de nouveau pour ne plus se lâcher quand elle ordonne à tout ce petit monde de déguerpir. La lionne se réveille. Celle qui avait su accrocher son cœur à l'époque, celle qui avait alimenté l'étincelle jusqu'à ce qu'il décide que ce soit terminé. Peut être un peu aussi parce qu'il voulait être celui qui prenait la décision. ok. qu'il dit en haussant les épaules, la conscience d'être allé un peu loin peut être ? Ou il joue naturellement avec ces nerfs, souhaitant dissipé le fossé qui s'creuse pour le combler. Lui qui joint volontiers son accord à son doigts sur la chaine, musique qu'il éteint non sans un regard jeté à la brune à la dérobée.

Sa proie d'un soir vient se coller à lui, elle est clairement bourrée et c'est loin d'être un détail qui arrête Elvis en général. Innocence qu'il rêverait de lui arracher dans un autre contexte. Il n'compte plus les minettes qu'il a dévergondé au fil des années. La colère qu'il a laissé grandir et qui le pousse aujourd'hui à tous les vices. Excuse grandiose à sa mesquinerie. Y'a ces fêlures chez lui, lui qui n'cherche plus l'bonheur. Illusion qu'il n'a plus depuis longtemps. La vie est une saloperie et il le sait. C'est comme ça. Et il s'étonne souvent d'la naïveté de ce petit monde autour de lui qui croit encore au père noël. C'est sans délicatesse qu'il lui explique qu'il n'a plus envie, gifle qu'elle impose contre sa joue alors qu'il fait de même. Reflexe non ? Main contre la joue, une larme vient couler sur son visage avant qu'elle ne soit la dernière à claquer la porte. Ego qui finira pas le renverser, lui qui s'croit bien meilleur que ce qu'il est. Ou alors c'est ce qu'il montre qui est mauvais. Peut être qu'il suffirait d'creuser en fait. Et lui, il vient récupérer l'joint qui tournait, désormais posé dans l'cendrier avant de se saisir de la télécommande pour allumer la télévision. Sourire carnassier qu'il offre à Barbara accompagné d'un regard enivrant. bonne nuit. Briquet qui lui sert à allumer sa cigarette qui rigole avant de ne plus lui porter d'attention et se tourner vers l'écran. Il arrête de jouer. Il retire ses cartes. Lui. Parce que c'est lui qui décide quand ça commence et quand ça fini.

@elvis jenkins

si elle devait recenser l’intégralité des lames qu’il lui assène en pleine poitrine, barbara aurait à sa disposition suffisamment de matière pour écrire une encyclopédie en cinquante volumes et qui serait toujours en cours d’écriture. elle n’était jamais venue questionner leur relation, personne d’autre d’ailleurs. ni elvis, ni les garçons, ni son entourage. enfin, il y a eu quelque fois où le sujet avait été posé sur la table mais barbara avait mis un terme à la conversation en moins de quelques secondes. depuis, plus personne ne s’y était risqué pourtant ce n’est pas faute de voir les larmes se déverser. elle a appris à le faire en silence jointe à une discrétion la plus totale. aujourd’hui cela lui arrive de moins en moins mais elle avait déjà déposé les larmes à ses pieds à multiples reprises. ça n’avait pas eu l’air d’avoir un effet quelconque sur elvis. à se demander, si son coeur bat quelque part. barbara est persuadée qu’elvis, il a un coeur qu’il s’attache à dissimuler sous des couches d’amertume ou peut-être que c’est autre chose.

- ok ? répète-t-elle incapable de cacher sa surprise. elle ne s’y attendait pas à celle-là.

juste ok? comment ça juste ok? depuis quand il dit ok. qu’est-ce qu’il est en train de préparer. putain, pas ce soir elvis. plus tard si tu veux, mais pas maintenant. par pitié, j’espère qu’il va la virer elle aussi. j’veux pas la voir, faut qu’elle dégage.

elle tire une longue latte en l’observant s’afférer dans le salon, la musique s’évaporer dans les airs.  le calme emplit la pièce soudainement. le calme et quelque chose de lourd qui vient teinter l’atmosphère.

qu’est-ce que tu prépares elvis, putain.

il ne manque pas de lui lancer des regards comme pour attirer le sien sur ses gestes. ses yeux semblent hurler ‘regarde bien barbara’ et elle reste particulièrement léthargique. elle retourne le retour de son courroux quand l’appartement sera vide et qu’ils se retrouveront tous les deux. elvis, il fait pas attention aux autres même quand on lui spécifie. pourtant, ce soir, malgré une bataille, il concédait à sa demande.

c’est trop facile, barbara. c'est jamais facile.

sans en avoir conscience, barbara se fait craquer un à un les doigts de sa main droite à plusieurs reprises et ce même si les fois suivantes, plus rien ne craque. elle toise du regard la blonde d’elvis qui n’hésite pas une seconde à se coller à lui.

elle est ridicule, putain. elle arrive même pas à aligner deux mots

barbara juge cette fille qui n’a rien demandé pourtant elle serait bien mal placée pour juger quiconque. barbara, des cuites elles s’en était prise des monstrueuses, certaines même avec elvis. et quand cela lui été arrivée, elle non plus elle n’était pas belle à regarder. son corps sursaute légèrement quand elle entend le bruit de la main de l’inconnue rencontrer la joue d’elvis. barbara aurait pu rire mais elle ne rit pas.

pour qui elle se prend cette petite conne ? putain, d’où elle fout une gifle à elvis.

et même quand le karma s’invite à la danse pour faire payer elvis ses actes - bien qu’une gifle reste particulièrement light, barbara n’est pas satisfaite. parce qu’elle n’accepte pas qu’on touche à elvis, même si c’est pour lui foutre une paire de claques.

et il lui en fout une lui aussi, mais il est con où quoi?

elle aurait pu lui faire une leçon de morale, mais barbara ça fait longtemps qu’elle a abandonné l’idée de le reprendre, enfin avait-elle déjà vraiment essayé ?

j’suis morte là, il va me le faire payer, c’est obligé. putain, j’aurais mieux fait de fermer ma gueule. j’aurais dû rester dans ma chambre et m’foutre des bouchons d’oreilles. elle vient se masser les temps furtivement de façon circulaire. son pouce et son index glissent contre l’arête de son nez avant de s’éloigner sur le haut de chacune de ses pommettes. elle émet un léger soufflement.

et là tout de suite, elle pense à milo, et peut-être qu’elle aurait juste envie d’être enlacer de ses bras. ouais, ça serait bien plus doux que tout ce cirque.

elle plisse les yeux quand il lui dit bonne nuit. l’incompréhension habille son visage fatigué.

bonne nuit et c’est tout ? alors là… vraiment… je… tu devrais aller te coucher. ouais, mais j’ai un joint à finir. ouais, peut-être que je vais l’finir dans ma chambre. en même temps, il t’a réveillé tu peux bien le fumer où tu veux ton putain de joint et puis tu vas pas gâcher ton verre… ouais mais là il va m’assassiner sur place… puis je l’emmerde, j’suis chez moi aussi.

elle se débat avec ses pensées contradictoires, mélange d’instinct de survie et de fines provocations. elle reste debout perplexe pendant quelques minutes avant de se remettre en mouvement. ses pieds nus avancent l’un après l’autre se traînant telle une gamine coupable prise sur le vif. elle s’installe dans le canapé en repliant ses genoux. elle n’a pas choisi sa place de façon aléatoire. elle s’est installée de façon à être la plus éloignée d’elvis.

Il ne faut pas croire que ces actions sont synonymes du fait qu'il a abandonné la partie, bien au contraire. Elvis n'est jamais là où on l'attend, imprévisible et impulsif, il agit à son bon gré sans trop se soucier des émotions qu'il provoque autour de lui. Gamin égoïste qui tend à faire réagir Barbara, ça ne veut pas dire qu'elle mène le jeu et qu'il a décidé d'écouter ces plaintes délicates. Il a juste soudainement décidé que ce conflit était sans intérêt et il y a mit un terme. Limites qui se posent peut être finalement pour ne pas blesser trop vivement son amie ou simplement pour continuer de la garder sous sa coupe sournoise. Elle qui doit penser à cet instant qu'elle a de nouveau les cartes en mains et qu'il a abdiqué. Et la surprise qu'il lit sur son visage calme le reste et le fait sourire. Incompréhension qu'il lit dans ce regard noisette. Il a touché en plein dans le mille encore une fois alors qu'elle choisi finalement de venir le rejoindre dans le salon. Son sourire machiavélique qui se pose sur ses lèvres. Il a gagné. Encore une fois. Comme toujours. Et cette sensation se veut grisante. Jeu de dupe. Lui qui manipule si bien l'esprit de sa comparse musicale. Tu veux regarder un truc avec moi ? qu'il lâche alors que chacun tire sur son joint, le regard fixé sur l'écran même si ces yeux se dérobent parfois pour l'observer. Coin de l'œil actif. Il finit par hausser les épaules et ajouter joueur de nouveau : Tu voulais pas dormir ? Il ne la regarde pas vraiment alors que le joint vient épousé ses lèvres. Enfin, j'me serais fait chier d'toutes façons avec elle. Il pose les bases, la laissant toujours croire qu'elle a la main, regard qu'il coule dans sa direction pour lui faire comprendre qu'elle, elle a compté, qu'avec elle, c'était différent. Oui, un regard peut suggérer un paquet de choses et être entendu de bien des manières aussi d'ailleurs.

Il laisse un silence plombant venir s'installer avant de planter son couteau, celui qui trainasse dans sa tête depuis qu'il a viré tout ce beau monde. j'crois que depuis que j'ai rencontré c'te meuf de toutes façons, y'en a aucune qui compte, aucune qui lui arrivera jamais à la cheville. Il le pense vraiment en plus le con. Venus qui a su aiguisé tous ces sens à la perfection. Venus qui a éveillé trop d'choses chez lui. Particulièrement malsaines. Et s'il veut la rendre un peu jalouse avec ces mots Barbara. Il s'rend pas compte qu'il fait de la relation qu'ils ont vécu un simple et magnifique néant. Comme si elle n'avait pas du tout compter pour lui. Comme s'il la balayait d'un revers de la main. Comme si c'était facile. Sa méchanceté qui atteint des sommets sans même qu'il ne s'en rende compte. Ou peut être que si. Dans l'fond c'est tellement compliqué d'être dans sa tête que parfois on ne réalise pas jusqu'où il pourrait aller pour saboter sa propre existence. j't'en ai parlé non ? qu'il ajoute, sachant très bien que non. Le couteau qu'il tourne dans la plaie, jubilatoire de mener la partie de cette façon. Gros con. Vraiment, un bel enculé. Lui en vouloir n'aurait pourtant pas de sens, lui qui est conscient sans l'être du mal qu'il fait. Lui qui prend la jeu comme un jeu terrifiant.

@elvis jenkins

il y a quelque chose de pesant dans l’air, comme si les éclairs se retenaient de gronder. le calme avant la tempête, avant que les évènements se déchaînent. demain, elle se plaindra d’avoir mal au dos faute à ses omoplates apparentes qui se maintiennent contractées. depuis l’enfance, barbara a toujours pensé qu’elle avait le devoir de porter tous les malheurs du monde sur ses seules épaules. tout ceci entraînant chez elle un sentiment démesuré à se croire responsable des autres tant de leurs gestes que de leurs paroles et elvis n’échappe par à ses règles internes particulièrement décousues.

son regard s’est porté sur le coin droit de la télévision. ses pupilles dilatées semblent s’être échappées pendant un instant de sa réalité. barbara rumine ses pensées en vitesse accélérée et quand il lui propose de regarder quelque chose avec lui, elle ne bronche pas. son corps semble soudainement être devenu paresseux et atone. ses envies sont contradictoires. elle n’avait pas envie de regarder quoique ce soit avec elvis pour autant elle n’avait pas non plus envie de le laisser végéter dans le salon en solitaire.

elvis, elle a parfois l’impression de le connaître réellement et puis il a toujours un acte ou une parole qui vient faire ébranler toutes ses certitudes. après tout ce temps, barbara reste souvent pantoise face à lui. elle fait preuve de naïveté sidérante. elle s’use à aller au combat alors qu’il a déjà trois coups d’avance. elle anticipe rarement ses coups suivants trop occupée à comprendre celui qu’il vient de lui asséner. et à la fin, le roi jubile.

son corps réagit suscintivement alors qu’elle lâche - j’aime pas gaspiller secouant sa tête légèrement sur le côté dans le but de montrer son verre qu’elle tient. elle n’aime pas gâcher mais surtout elle n’est plus capable de dormir. elle s’est faite bousculer et elle ne peut plus faire taire son esprit bavard. elle laisse le regard d’elvis l’envahir.

il se serait fait chier? c’est ça ouais.

elle hausse légèrement les sourcils pour lui signifier qu’elle avait entendu mais qu’elle s’abstiendrait de tous commentaires. elle n’a rien à y dire, de toute façon, barbara n’était pas dans ses plans depuis le début. elle avait tout simplement surgit sans s’annoncer. il avait fini par la choisir elle, plutôt que cette petite conne. c’est ce qu’il lui fait croire, et elle aime y croire.

et encore cette fois, barbara ne voit rien venir. sa respiration se saccade quand elle entend ses mots qui se mélangent dans son esprit sans lui donner la possibilité de les interpréter correctement. elle n’y comprend plus rien et venu de nul part, barbara se fait emporter par un tsunami violent et oppressif. sa cage thoracique se gonfle difficilement. elle essaie de déglutir tant bien que mal alors que sa gorge se serre. elle ferme ses paupières pour retenir son liquide lacrymal prêt à déborder.

elle ne se fait pas d’illusion, elle pleurera toute la matinée blottit sous sa couette, son téléphone sur silencieux. barbara décide alors de glisser le long du canapé pour s’allonger sur le dos. elle essaie de gagner du temps sans s’en rendre compte. elle n’en revenait pas.

elvis venait de se montrer exécrable à un niveau auquel barbara n’avait jamais eu encore accès. elle pensait que le voir se pavaner avec une fille était déjà le summum de ce qu’elle pouvait entendre ou voir mais là c’était le niveau supérieur. barbara n’était pas assez solide pour l’affronter sur ce terrain là. elle a l’impression que quelqu’un est en train de broyer son coeur de manière tout à fait déshumanisée.

elle n’a pas pu conserver ses larmes très longtemps, dans le coins de ses yeux roulent deux larmes qui viendront arrêter leur course dans sa chevelure. sa respiration s’accélère alors qu’elle essaie tant que mal de la contrôler.

elle ne sait pas à ce moment précis ce qui lui fait le plus mal : qu’il ait une fille qui compte suffisamment à ses yeux pour qu’il puisse dire ce genre de chose - une première pour barbara qui n'avait jamais entendu ce discours dans la bouche d'elvis, qu’il n’en ait aucune autre qui compte - et elle alors? ou qu’aucune autre n’arrivera jamais à sa cheville.

elle aurait envie de lui hurler dessus, lui demander à quoi il joue, pourquoi il s’acharne à vouloir la rendre si triste et mélancolique.  - non, t’as dû oublier articule-t-elle lentement d’une voix particulièrement émue.